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Par Aymeric Engelhard

 

Attention critique violente. Ames sensibles, s’abstenir. Le rédacteur cinéma s’en va crucifier celui qui n’en finit plus de détruire l’esprit des bande-dessinées qu’il adapte. Astérix et maintenant le Marsupilami. Il est grand temps d’arrêter de prendre le spectateur de base pour une banane ! Chabat, avant c’était rigolo, maintenant c’est plus que consternant.

 

Qu’on arrête de dire qu’« Astérix et Obélix Mission Cléopâtre » s’inscrivait dans l’esprit de l’œuvre érigée par feu Goscinny et le grand Uderzo. Drôle par moment, inventive à d’autres, cette seconde adaptation des aventures du plus célèbre des Gaulois marque surtout par le retrait invraisemblable des deux protagonistes au profit d’un Jamel Debbouze omniprésent et dont les dialogues ne sont que le prolongement indigeste de ses sketchs. Alain Chabat, pourtant fan de BD comme on en fait plus, réalisa surtout un film destiné au plus grand nombre, celui-là même qui allaita sans se poser de question et qui continue bêtement de rabâcher les répliques puériles. Rien dans le film ne laissait réellement transparaître l’esprit des auteurs originels. Dix ans plus tard, l’ex-Nul se permet d’abattre un autre grand nom du neuvième art franco-belge : Franquin et son fabuleux Marsupilami. Quand on voit le résultat, il apparaît absolument invraisemblable que son auteur ait bossé sept ans sur le scénario. D’ailleurs la première question qui vient en fin de métrage est : Mais à quoi sert donc le Marsupilami ? Doté d’un temps de présence ridiculement court, la délirante bête jaune à pois noirs reçoit le même traitement qu’Astérix et Obélix : il est clairement, indéniablement, scandaleusement relégué au second plan. Aucune scène comique ne le concerne, il semble totalement absent d’un spectacle qui ne fait que la part belle à une bande d’acteurs qui ne le valent même pas. Si Chabat sera bien capable de faire resurgir quelques rares relents Nullesques forcément irrésistibles, Debbouze et Fred Testot cabotinent bêtement, se ridiculisent sans cesse et ne font jamais, au grand jamais, rire. Le réalisateur se permet même quelques délires personnels qui n’ont absolument rien à faire là. L’extraordinaire numéro d’un Lambert Wilson grand admirateur de Céline Dion constitue l’unique véritable qualité du film mais au final ce ne sont que quelques minutes de plus sans le personnage titre. Chabat enchaîne les scènes inutiles (les ¾ de la scène au sein de la tribu Paya, chacune des apparitions de Géraldine Nakache…), les bêtises puériles (le géant à la voie suraiguë, le perroquet vulgaire…) pour une comédie qui ne peut que plaire aux inébranlables amateurs de « Mission Cléopâtre ». N’empêche, il doit bien rigoler Hergé dans sa tombe. Franquin, Goscinny, Morris (« Lucky Luke ») et Peyo (« Les Schtroumpfs »), eux, doivent bien se retourner. Il y a clairement des claques qui se perdent. « Sur la piste du Marsupilami », s’il avait su créer un semblant d’attente en raison du taux d’ambition d’un tel projet, se révèle en tant que comédie francophone des plus désagréables. Jusque dans les quelques consternantes vannes finales contenues dans le générique La créature titre est magnifique, à la décharge de Chabat, mais son insolente inutilité ne sera jamais pardonnée. Si l’œuvre de Franquin relève de la maestria, son adaptation sur grand écran est une écrasante bouse.