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Par Justin Calixte

 

Dommage que Marco qui adore le « name droping » et ne cache pas sa fierté de posséder l’un des plus beaux carnets d’adresses de Lyon, ne m’ait pas accompagné pour déjeuner avec José Artur, il aurait fait des complexes devant celui qui fut le prince de l’interview.

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Si vous avez plus de 40 ans, vous connaissez évidemment José Artur qui officia pendant un demi-siècle sur France Inter et à la télé. Rien que ça.

Si vous avez moins de 40 ans, comme beaucoup de lecteurs de ce magazine, vous devez plutôt connaître ce pauvre Arthur, si j’ose dire car il est riche à milliards. Dommage pour vous.

 

José Artur a rencontré tous ceux qui en France, mais aussi dans le monde, ont fait l’actualité du XXè siècle. Son dernier bouquin nous permet de partager avec lui les moments magiques que lui a procuré le « plaisir des autres ». Qu’ils aient été princes, poètes, comédiens, chanteurs, écrivains, philosophes, peintres ou scientifiques… Arletty, Barbara, Brassens, Calas, Coluche, Delon, Duras, Fellini, Gainsbourg (ci-dessous), Gréco, Guitry, Ionesco, Montand, Piaf, Picasso, Prévert, Sartre, et même Zidane figurent au générique de ce livre qui ravira tous ceux qui aiment se plonger dans les vieux Paris Match et qui ne détestent pas Radio Nostalgie.

Les plus jeunes pourront découvrir ce qu’était un grand intervieweur du temps jadis. Cultivé, drôle, élégant avec juste ce qu’il faut d’impertinence et de cabotinage. José Artur n’a pas changé. Ou si peu. Nous sommes loin de la vulgarité et de l’inculture de ses successeurs. Jean Yanne qui n’était pas à une méchanceté près, l’avait surnommé « le raté flamboyant ». Pas si mal vu ! Le cancre qu’il fut, enrichi par toutes ses rencontres avec « les autres », est devenu un dandy flamboyant, Pic de la Mirandole du 20ème siècle qu’on ne se lasse pas d’écouter et qu’on regrette de ne plus entendre.

« Au plaisir des autres » José Artur / Editeur Michel Lafon / 18, 95 €

 

 

Interview express du prince de l’interview

 

Vous avez été un pionnier puisque vous avez introduit l’impertinence voire l’insolence dans vos interviews. Vous avez fait des petits qui, année après année, se sont livrés à la surenchère. Ne regrettez-vous pas certains jours, d’avoir ouvert cette voie où se sont engouffrés pas mal de gougnafiers ?

Je n’ai jamais eu ni regret ni remord. Ou si peu. C’est vrai que l’époque est dominée par une remarquable inculture et a recours à une facilité regrettable. Au point que, même les journaux TV font dans la dérision préférant l’anecdotique à la réflexion.

 

Parmi toutes vos interviews, laquelle fût :

– la + difficile ?

Toutes celles avec des gens ayant eu recours à des substances illicites. L’alcool permet au contraire à certains de se lâcher. Mais pour Antoine Blondin, par exemple, ce n’était pas facile.

– la + inattendue ?

C’était à Nice. Je ne devais interviewer personne. J’étais bourré comme un coing. A la fin du diner, Jacques Sallebert, mon patron de l’époque, me demande d’interroger la Marquise de Villaverde, en me précisant, au dernier moment, qu’elle était la fille de Franco. J’improvise une première question : « quel effet ça fait d’être la fille d’un assassin ? » Il n’y eut pas de deuxième question ! On m’emmena manu militari ! Et le quai d’Orsay régla les détails de cet incident diplomatique.

– la + longue ?

Ce fut une auto interview de trois heures. Je faisais une émission en direct du rallye des Gaves de mon ami Jacques Chancel. Il y eut une mini tornade. Plus de lumière, plus de public, plus d’invité. J’ai tenu tant bien que mal 3 heures, à la bougie grâce au groupe de secours qui permettait d’émettre, en m’auto-interrogeant. J’ai ramé.

 

– celle dont vous êtes le plus fier ?

La première ! Ma mère m’avait écouté et m’avait trouvé très bon.

 

– la +marquante ?

Toutes celles qui m’ont permis de rencontrer des mythes que le cancre que je fus n’avait même pas imaginé croiser un jour : Prévert, Fritz Lang, Paul Mac Cartney, les 70 ans de Duke Ellington.

 

En quelques mots, comment définiriez-vous le style de vos enfants :

Yves Calvi ?

Le fils de Gérard… Très bon, il sait de quoi il parle.

 

Frédéric Taddéi ?

Comment ne pas trouver très bien quelqu’un qui, je le sais, m’aime bien.

 

Michel Denisot ?

Il sait recevoir. Excellent.

 

Poivre d’Arvor ?

Comme Sarko, capable du meilleur et du pire.

 

Morandini ?

Morandiqui ? Connais pas.

 

Philippe Bouvard ?

C’est mon frère. Sa formidable réussite devrait rassurer tous les mômes qui ont du mal avec les études.

 

Laurent Ruquier ?

Il rit encore plus fort de ses propres plaisanteries que de celles des autres.

 

Thierry Ardisson ?

Il a beaucoup changé.

 

Naulleau et Zemour (les flingueurs de Ruquier) ?

Ca m’amuserait de les rencontrer.

 

Si vous deviez interviewer Dieu, quelle question lui poseriez-vous ?

Je lui demanderais s’il n’a pas honte… D’ailleurs, vous avez vu mon âge, il retarde l’échéance pour me rencontrer.