coraline
Par Aymeric Engelhard

 

Le thème de l’enfant innocent qui se réfugie dans un monde de rêve pour échapper à son quotidien décevant s’est fréquemment vu dans l’univers de l’animation. Aussi ce monde donne souvent lieu à de sombres évènements qui mettront l’enfant en situation de bravoure. « Coraline » est dans cette veine là et se classe même comme une belle réussite.

 

« Coraline » peut se classer dans cette fameuse catégorie des films qui traitent de la fuite d’un enfant dans un autre monde magique et fantastique. Il peut alors se ranger aux côtés d’ « Alice au pays des merveilles » ou encore du « Labyrinthe de Pan ». Comme Alice et Ofélia, la petite Coraline découvre un univers parallèle sombre et animé qui se transformera en véritable défi pour en sortir. Ici, il est semblable au nôtre mais tout y est mieux. En passant la petite porte dérobée du salon, Coraline retrouve son père et sa mère, sa maison, son existence… Sauf que tout cela est une utopie. Et les utopies n’existent pas. Sa fausse mère se révèle être une créature démoniaque, une tisseuse de cauchemar qui rend heureux les enfants pour ensuite les emprisonner à jamais. La pauvre et innocente jeune fille devra se donner corps et âme pour s’en sortir et éviter que ses vrais parents ne sombrent à leur tour dans le piège de la porte dérobée… Ce film qui pourrait paraître enfantin prend chaque minute de l’ampleur. Peu à peu il s’éloigne de son statut d’origine pour se tourner vers le conte pour adulte. « Coraline » se révèle glauque et cauchemardesque. Mais tellement beau… L’univers visuel qui nous est proposé, somptueux d’originalité, rempli de trouvaille, nous fait parfois douter du style d’animation privilégié par le réalisateur. Pourtant « Coraline » n’est pas un long-métrage entièrement numérique, tout en images de synthèse. Non. Il s’agit là de décors miniatures et de petites marionnettes malléables. Imaginez… Dans une seconde il y a 24 images. Vous placez le personnage, vous filmez, vous stoppez, vous bougez très légèrement la marionnette, vous filmez… Le film dure 1 h 40. Cela donne deux ans de pré-production pour tout mettre au point et dix-huit mois de tournage. Un travail de titan pour un résultat envoutant. C’est la troisième fois que le réalisateur Henry Selick se lance dans un long-métrage de ce type. C’est déjà lui qui avait mis en scène le cultissime « Etrange Noël de Monsieur Jack » et « James et la Pèche géante » pour le compte de Disney. On retrouve bien son univers décalé et sombrement fantastique qui joue avec les contes pour enfant. Comme Tim Burton (qui avait travaillé avec lui pour « L’Etrange Noël de Monsieur Jack ») sur « Les Noces Funèbres » (qui utilise le même procédé), le monde parallèle est bien plus drôle et fou que la réalité. Sauf que le film de Burton est un chef d’œuvre à la différence de « Coraline ». Excellent mais nullement exceptionnel dans son déroulement, il fait parfois preuve de longueurs au début. Aussi on était en droit d’attendre un peu mieux de la part du français Bruno Coulais (« Les Choristes ») au niveau musical. Reste que l’on a l’impression d’assister à un rêve qui tourne au cauchemar, mais un cauchemar dont on n’a pas envie de sortir. Le long-métrage passe à une vitesse folle, on est littéralement embarqué dans l’aventure. Du très bon travail.