jusquen-enfer
Par Aymeric Engelhard

 

Film d’horreur ne rime pas forcément avec gore. C’est ce que beaucoup de metteurs en scène n’ont pas compris ces derniers mois. Oubliez l’hémoglobine et réservez un accueil chaleureux à l’épouvante pure, un véritable train fantôme virtuose qui marque le retour en force d’un grand réalisateur dans le genre qui l’a consacré.

 

Culotté le Sam Raimi. Il entre dans le monde de la réalisation avec un premier film d’horreur joliment intitulé « Evil Dead ». Celui-ci finit par casser la baraque chez les amateurs et donnera deux suites. Sa mise en scène alterne humour noir et horreur pure. C’est à s’en remplir le bide de pop-corn les yeux rivés sur l’écran. Suivront quelques films qui passeront plus inaperçus où l’homme est rattrapé par Hollywood. Puis il explose avec la trilogie « Spider-Man » dont le quatrième est déjà en préparation. Même là des références à l’horreur des 80’s se font voir. 2009 marque le retour du maître dans son château. Raimi fait ce que les autres ne font plus. Il fait peur. L’horreur moderne se résume aux débilitants « Saw » dont on se demande quand cela va s’arrêter (bientôt le sixième…). Mais Raimi, lui, veut donner des sensations, du mordant. Le spectateur doit décoller de son siège. Mission accomplie : « Jusqu’en enfer » est littéralement terrifiant. Sur la base d’un petit scénario sympathique mettant en scène une pauvre banquière victime d’une malédiction, il concocte un joli cauchemar visuel. Pas très original certes, mais pas si courant que cela ces derniers temps. Christine, une jolie spécialiste en crédit immobilier très bien interprétée par Alison Lohman (« Big Fish »), refuse d’accorder un crédit supplémentaire à une vieille femme pour son logement. Cette dernière la maudit après l’avoir attaquée dans un parking. Trois jours de cauchemar commencent alors pour la jeune femme. Dès la scène d’ouverture, on est mis dans le bain. On sent la tension arriver, la musique s’arrête et on sursaute comme jamais ! Les images fusent, on est constamment sur le qui-vive, la nervosité atteint son paroxysme. Partout où il s’aventure, « Jusqu’en enfer » fait sacrément peur. Sauf peut-être dans l’humour. Un humour bien noir super grisant qui contraste avec l’épouvante. L’imagination de Sam Raimi dépasse les espérances. Il ne va pas trop loin, bien qu’il sombre parfois dans la facilité. Le démon qui pourchasse Christine n’est jamais réellement montré. On voit son ombre grandissante. Il prend possession de personnes (et même d’une chèvre pour un passage hilarant). Sa présence est inéluctable. On ne dévoilera pas la fin mais celle-ci est pour le moins inattendue. Elle fait partie des nombreuses scènes de bravoure du long-métrage (avec le début, la séance de spiritisme, ou encore cette fabuleuse séquence dans un cimetière). Le retour de Sam Raimi au royaume de l’horreur donne peut-être le meilleur film du genre depuis longtemps. Associé à son frère, Ivan, et aux références issues des 80’s, il réalise un véritable cauchemar sur pellicule, une réussite à bien des égards. Peut-être « Jusqu’en enfer » ne restera-t-il pas dans les annales mais sachez-le : le pays de l’horreur et de l’épouvante a retrouvé l’un de ses plus grands maîtres.