the-ghost-rider
Par Aymeric Engelhard

 

Décidément les temps sont durs pour Roman Polanski. Après avoir subi la loi du passé, le réalisateur revient au cinéma avec une œuvre qui, si elle n’avait pas reçue l’Ours d’argent au festival de Berlin, aurait eu une toute autre aura. En effet le retour de Polanski s’avère bien pauvre…


Tout rapport avec la situation dans laquelle s’est retrouvé Roman Polanski ces derniers temps est inexact. La production principale du film s’est déroulée avant que le réalisateur ne soit rattrapé par son impardonnable passé. Ainsi la confrontation qui fait la trame de « The Ghost Writer » n’a pas à être remise sur table pour expliquer les bêtises de son dernier long-métrage. Ici, un écrivain remplace son prédécesseur, mystérieusement mort, pour écrire la biographie d’un homme d’état britannique. En creusant, il découvre que l’homme et son entourage cachent bien leur jeu… Pour mettre en scène la confrontation qui va faire rage (finalement pas tant que ça) entre les deux hommes, Polanski reste calme et ne fait rien pour donner un peu de panache à son action. Son histoire se met en place tranquillement, se déroule calmement, quelques embûches bien minimes viennent mettre des bâtons dans les roues du biographe… Le scénario aurait pu devenir passionnant mais force est de constater que l’ennui prend vite ses droits. Polanski ne faisant rien pour donner le moindre intérêt, il faut attendre que les 2/3 du métrage soient écoulés pour que le film prenne enfin du sens. Le suspense fait son apparition lors d’une scène rythmée à la perfection. Une poursuite aveugle et invisible suivie d’une rencontre étonnante déverrouillent le film. Enfin le twist final, surprenant et bien plus finement mis en scène que celui de « Shutter Island » (un plan-séquence inouï sur un bout de papier), termine l’œuvre, aussi inégale soit-elle.

 

Mais c’est tellement laborieux pour en arriver là que le charme a du mal à opérer totalement. Alors on admire la grande classe des plans offerts par le réalisateur. Polanski trouve quand même le moyen de rendre chaque image superbe. Dommage alors que la musique ne soit pas du tout en accord avec elles. Curieusement, le Français chouchou d’Hollywood, Alexandre Desplat, s’est écrasé en plein vol. Son score semble sorti d’un autre film tant il est différent de ce qui aurait été nécessaire pour vraiment rentrer dans l’histoire. Finalement, outre quelques piques de mise en scène, ce sont bien les acteurs qui font le spectacle. Ewan McGregor confirme (si besoin était) son excellence, plein de sobriété et d’aisance. Face à lui, l’ex James Bond, Pierce Brosnan, trouve un rôle de salaud parfait. On retiendra aussi l’apparition peut-être trop courte d’Eli Wallach, acteur culte depuis qu’il a interprété Tuco dans « Le Bon, la Brute et le Truand ». Heureusement que le casting se met en quatre pour son réalisateur, c’est déjà pas mal. Mais pourquoi donc certains prétendent voir dans « The Ghost Writer », une œuvre bien meilleure que l’exceptionnel « Pianiste » ? Face à tant d’ennui, on assiste plutôt à l’une des œuvres les moins réussies de la riche carrière de ce grand metteur en scène qu’est Polanski. Et heureusement qu’il filme comme un chef (et qu’il sait choisir ses acteurs) car sinon l’oreiller serait devenu un grand ami…